Tchad: la Gestion de l’Hygiène Menstruelle (GHM) et l’éducation inclusive sont au cœur des débats

12 janvier 2022

éducation inclusive
Dar El Salam: Le Club des filles, qui a reçu un kit GHM et une formation par le JRS, avec l'ACRA et le CELIAF, et le soutien du MENFP, de l'UNICEF et de l'ECW.

En partenariat avec Education Cannot Wait, l’UNICEF et le Ministère tchadien de l’Education et de la Formation Professionnelle, le Service Jésuite des Réfugiés du Tchad jette les bases de la Gestion de l’Hygiène Menstruelle (GHM) et de l’éducation inclusive dans la région du lac Tchad et du Logone Oriental.

Plus de 6 000 élèves réfugiées et déplacées qui fréquentent les écoles locales bénéficient désormais de ces services.

L’accès aux kits GHM est essentiel pour protéger les jeunes femmes de la honte publique, de l’absentéisme ou de l’abandon scolaire.

« Auparavant, mes règles m’empêchaient d’aller à l’école », raconte Bana Gana, 15 ans, qui fréquente l’école Foul Foul dans l’ouest du Tchad. « Avant de recevoir les kits GHM du JRS, je n’avais rien à porter pendant mes règles. Ce kit nous permet de cacher la serviette à l’intérieur de la trousse de rangement et de rentrer à la maison pour nous laver sans que personne ne le remarque. »

Avec une attention, des soins et des ressources appropriés, les jeunes femmes peuvent se sentir habilitées à poursuivre leur scolarité, à gagner en confiance et en indépendance, et à contribuer plus que jamais à leur communauté.

« Si vous éduquez un homme, vous éduquez un individu », a affirmé l’intellectuel et universitaire ghanéen James Emman Kwegyir Aggrey.  « Si vous éduquez une femme, vous éduquez une nation entière . »

Découvrez ci-dessous d’autres témoignages de filles bénéficiant de la formation sur la GHM et de l’éducation inclusive dans toute la région:

 

Hazida, 14 ans

« Lorsque les filles ont leurs règles, elles ont honte d’aller à l’école. La première fois que j’ai eu mes menstruations, j’ai eu peur, je pensais que j’étais malade. Pourtant, ma grand-mère m’avait déjà parlé des menstruations et ma mère m’avait expliqué ce qu’il fallait faire lorsque j’avais mes règles.

Le kit GHM du JRS m’a beaucoup aidé dans ma vie quotidienne. Pendant la formation, j’ai appris à utiliser les serviettes hygiéniques et à me protéger.

À l’école, j’aime lire et écrire, j’apprends beaucoup de choses. Dans le futur, je veux devenir enseignante. »

 

Kaikai, 14 ans

« J’ai eu mes premières règles il y a une semaine [fin novembre 2021]. Certaines filles du village ont pleuré quand elles ont eu leurs règles, mais après les formations du JRS sur la GHM, nous sommes plus à l’aise avec cela. Avant, je ne savais pas qu’il était possible d’aller à l’école pendant mes règles. 

L’école est importante pour devenir un médecin ou même un ministre. Nos parents ne savent ni lire ni écrire. Alors, nous pouvons leur lire leurs fiches médicales.

Mes parents sont conscients de l’importance de l’école. Ils ont même parfois vendu une chèvre si nous avions besoin de payer quelque chose pour mes études. Ils étaient également heureux lorsque j’ai reçu le kit GHM du JRS.

Pour améliorer la GHM des filles à l’école, il serait nécessaire d’améliorer les latrines actuelles, car il n’y a pas de porte et les autres élèves peuvent nous voir. Nous sommes obligées de nous cacher dans la brousse pour changer nos serviettes hygiéniques. 

Quand je serai plus âgée, je veux devenir sage-femme parce que certaines femmes ont beaucoup de problèmes lors de l’accouchement, et je veux les soulager. Je veux aussi sensibiliser les gens à la GHM. »

 

Malembe, 15 ans

“La vie est meilleure ici que dans ma ville natale au Nigeria, car je me sens en sécurité. Là-bas, nous étions en danger à cause de Boko Haram. J’ai aussi subi une attaque de leur part. J’ai vu comment ils allaient de porte en porte pour tirer sur les gens dans ma ville. Ma mère s’est enfuie en courant et en me portant sur son dos.

Je ne suis pas né avec mon handicap et je pouvais même marcher avant. Quand j’avais deux ans, on m’a emmené à l’hôpital parce que j’étais malade. Ils m’ont fait une injection et j’ai perdu la mobilité de mes jambes. Je n’ai plus été capable de marcher depuis.

Le 1er décembre, j’ai reçu un tricycle [par l’UNICEF et Humanity & Inclusion]. En classe, je me sens bien traité par le professeur mais je ne suis pas à l’aise pour aller au tableau. Maintenant, je vais pouvoir faire beaucoup de choses avec le tricycle et rencontrer mes amis en dehors de la classe.

 

Souhadi, Professeur

33 ans, originaire de Mayo Kebbi, Souhadi enseigne à l’école Malmairi depuis 6 ans. Après avoir suivi la formation du JRS sur la GHM, il s’est senti prêt à s’occuper d’une élève dont les menstruations arrivaient un jour d’école.

« La fille était dans la classe, assise sur le tapis. C’était la deuxième pause, et nous étions sur le point de rentrer à la maison. Quand elle s’est levée, ses camarades de classe ont remarqué qu’elle était tachée de sang. Certains ont refusé de prendre le tapis sur lequel la fille était assise.

Elle avait honte, restait assise et ne voulait pas se lever.

Je me suis approché de la fille pour la consoler. Je lui ai dit qu’elle ne devait pas avoir honte, qu’elle n’était pas la seule à avoir ses règles et qu’elle ne serait pas la dernière non plus. Que cela est naturel pour toutes les femmes et les filles.

Nous, les enseignants, avons fini par la convaincre de ne pas rester à la maison mais d’aller à l’école. Nous avons lavé le tapis nous-mêmes.

Le jour suivant, la jeune fille est venue à l’école comme elle l’avait promis, et elle est venue très régulièrement jusqu’à aujourd’hui.

La formation GHM du JRS a été très riche et bénéfique pour tous les enseignants. Nous avons appris à trouver les mots justes pour rassurer les filles sur ce qui leur arrive. Il y a des choses que nous ne savons pas, mais nous nous sentons maintenant mieux préparés à soutenir les filles pendant leurs règles. »

 

Cette histoire a été publiée à l’origine par JRS USA.