« Le savoir n’a pas d’âge »: alphabétisation pour femmes au Tchad

06 septembre 2022

alphabétisation femmes Tchad
L'après-midi et le soir, les femmes et les filles ont la possibilité d'apprendre à lire, à écrire et à calculer dans un cours d'alphabétisation organisé par le JRS Tchad à Fourkoulom.

À l’école de Fourkoulom, dans la province du lac Tchad, l’école ne ferme jamais ses portes.

Lorsque les enfants rentrent chez eux après les cours réguliers, le directeur et le directeur adjoint du centre continuent à enseigner à 100 filles et jeunes femmes, âgées de 12 à 25 ans. La plupart d’entre elles ont déjà abandonné l’école, ou n’ont même jamais eu l’occasion de suivre des cours.

Plus de 20 autres membres de la communauté, tels que de jeunes garçons, des femmes âgées ou des hommes d’âge moyen, ont également demandé à se joindre à cette initiative, conscients de l’importance de l’éducation.

Ce projet fait partie de la campagne Luz de las Niñas (LdN) d’Entreculturas, et il est organisé sur le terrain par le Service jésuite des réfugiés (JRS) Tchad.

 

Hadidja

Hadidja a 18 ans et vend des jus de fruits les jours de marché. Elle est l’une des étudiantes des cours d’alphabétisation du JRS.

 

« À l’âge de 7 ou 8 ans, j’ai quitté l’école parce qu’il y avait un professeur qui avait l’habitude de m’insulter. Il me donnait de mauvaises notes en classe, alors je me suis sentie découragée et j’ai décidé d’abandonner l’école.

Mes parents ne m’ont rien dit et ne m’ont pas forcé à rentrer à l’école parce que je travaillais dans le champ avec eux. Je n’avais pas le temps d’étudier et j’ai commencé à vendre du jus au marché.

Il y a deux ans, ma famille et moi avons quitté mon village parce que Boko Haram l’a attaqué. Au camp de Fourkouloum, deux amis m’ont parlé des cours d’alphabétisation du JRS et j’ai décidé d’y participer pour apprendre à lire et à écrire.

Avant, c’était difficile pour moi car je ne savais rien. Aujourd’hui, je sais calculer et écrire correctement. J’ai également appris à utiliser les billets de banque, à calculer et même à saluer en français. Ce cours nous améliore chaque jour. Il y a beaucoup de femmes [en classe] qui ne sont jamais allées à l’école, maintenant elles comprennent l’importance de la scolarité. À Fourkouloum, j’ai vu que les gens s’intéressaient à l’éducation, alors j’ai commencé à m’y intéresser aussi.

Je veux retourner à l’école et devenir médecin. »

 

Hadja

Âgée de 20 ans, Hadja travaille à la maison et suit les cours d’alphabétisation du JRS.

 

« À 10 ans, j’ai arrêté d’aller à l’école parce que nous avons été obligés de fuir notre village à cause de Boko Haram. Je ne suis jamais retournée à l’école car cela ne m’intéressait pas. Mon père ne m’a pas non plus encouragée [à étudier] et je ne faisais que le travail domestique à la maison parce que nous avions perdu notre mère. J’étais seule avec mon père et je devais m’occuper de mes frères et sœurs.

J’ai entendu parler de ce cours pour la première fois lorsque les enseignants ont fait du porte-à-porte pour encourager les filles à s’y inscrire. J’ai décidé de suivre les cours d’alphabétisation du JRS pour apprendre le français. Mon mari m’a également encouragée. Nous nous sommes mariés il y a trois ans. Il a dit que, par exemple, si les femmes créent une association, il est important que nous soyons instruites.

Je suis très heureuse de pouvoir participer au cours de JRS. Le jour, je travaille à la maison. Ma jeune sœur prépare le repas l’après-midi pour que je puisse venir en classe. Si j’ai le temps, j’étudie aussi à la maison. J’ai parfois du mal à écrire et à calculer. Je pense qu’il est très intéressant d’être en classe avec des personnes d’âges différents car le savoir n’a pas d’âge.

À l’avenir, je veux aller à l’école et devenir professeur. »

J'ai vu que les gens s'intéressaient à l'éducation, alors j'ai commencé à m'y intéresser aussi.
Hadidja

Gusseina Limsou

Le directeur adjoint de l’école de Fourkouloum et l’un des enseignants du cours d’alphabétisation du JRS.

 

« Il est crucial pour les femmes d’être alphabétisées (parler en public, lire, calculer…) pour pouvoir réussir dans leurs activités, comme l’agriculture.

La plupart des femmes qui suivent les cours d’alphabétisation sont mariées ou divorcées. Elles sont très motivées et elles avaient cessé d’aller à l’école parce que leurs familles les ont mariées.

D’autres femmes et membres de la communauté ont également demandé à assister aux cours, et nous les avons autorisés à y participer. Les filles doivent poursuivre leurs études. Elles ont le même droit que les garçons d’avoir une éducation. Si elles ne vont pas à l’école, elles auront des difficultés dans leur famille ou elles seront exposées à des mariages précoces. »

 

Abakar Moussa

Le directeur de l’école de Fourkouloum et l’un des enseignants des cours d’alphabétisation du JRS.

 

« Les parents m’avaient déjà demandé d’organiser des cours d’alphabétisation à l’école.

De nombreuses personnes viennent aux cours. Depuis avril, ils savent déjà lire et écrire. Si nous continuons comme ça, il y aura un grand changement dans le camp [de réfugiés].

Il y a une grande demande de cours d’alphabétisation. Nous aimerions avoir un professeur supplémentaire pour permettre à plus d’étudiants de suivre les cours. »

 

Blama Kumbo

Kumbou est l’un des chefs de village (également appelé Blama) et un Point Focal du JRS sur le site de Fourkouloum. Il a demandé au JRS de lui permettre de participer également aux cours d’alphabétisation.

 

« Je ne suis jamais allé à l’école et maintenant je suis les cours d’alphabétisation du JRS. Cela m’aide dans mes affaires, car ce n’est pas facile si vous ne parlez pas français.

Nous [notre génération] n’avons pas été à l’école. Maintenant, les enfants sont éduqués, et vous pouvez voir que leurs idées sont très différentes de celles de leurs parents. »

 

Visitez la galerie de photos pour découvrir plus sur le projet.

 

 

Publié à l’origine par JRS USA.