Anciens enfants soldats commencent une nouvelle vie en République centrafricaine

16 mai 2022

« J’ai rejoint le groupe armé parce que [un autre groupe] a tué mon père et ma mère, je voulais les venger. »

Aujourd’hui, Pierre* est un jeune homme qui travaille comme mécanicien à Bambari, en République centrafricaine (RCA).  Il avait neuf ans lorsqu’il a perdu ses parents. N’ayant pas d’autre choix, Pierre et son frère aîné sont devenus des « passeurs » pour un groupe armé local et ont vécu « dans la brousse » avec eux pendant des années.

Lorsqu’il a perdu son frère, il a décidé de laisser la violence derrière lui.

La vie de soldat n’avait pas été facile, mais le retour à la vie civile s’est avéré encore plus difficile. « J’ai traversé beaucoup d’épreuves. J’étais rejeté [par la société]. Les gens parlaient de moi », se souvient Pierre.

 

 

Depuis le début des désordres civils en 2013, les enfants de la République centrafricaine sont très exposés aux abus, au recrutement et à l’exploitation par les groupes armés. Des centaines de milliers de personnes ont depuis fui les violences. L’éducation a été gravement perturbée et encore plus interrompue par les restrictions imposées par la COVID-19 en 2020.

Pour favoriser l’inclusion sociale des enfants comme Pierre, en 2017, le JRS RCA a commencé à faire campagne pour la démobilisation des jeunes et à leur offrir des opportunités d’éducation et de formation.

Compte tenu de la stigmatisation à laquelle sont confrontés les anciens enfants soldats, ces activités ont également visé la communauté au sens large, afin d’encourager la réconciliation et de promouvoir la cohésion sociale.

Cinq ans plus tard, plus de 300 enfants ont quitté le combat, acquis de nouvelles compétences et commencé une nouvelle vie. En 2017, Pierre a participé à une formation de mécanicien moto et a commencé à travailler peu après. Grâce à son travail, il contribue aujourd’hui au ménage de son oncle, avec lequel il vit.

Le fait de pouvoir subvenir à ses besoins a libéré Pierre et lui a donné la possibilité de déterminer son propre avenir. « Ce travail peut m’aider où que j’aille. »

Je me sens utile, et je gagne honnêtement ma vie.
Jean-Jacques, ancien enfant soldat et participant à la formation sur les moyens de subsistance

 

 

 

Comme Pierre, Sylvester a rejoint un groupe armé lorsqu’il avait neuf ans.  « La vie était très difficile dans la brousse », se souvient-il. Pourtant, à l’époque, le combat semblait être la seule option : « L’important était de trouver de la nourriture au moins tous les jours. »

Lorsque ses chefs ont fini par être tués, Sylvester est retourné au village. Le retour fut difficile, car il n’avait pas de famille et sentait que tout le monde avait peur de lui.

Grâce à une formation du JRS, Sylvester a appris à produire du savon et a ouvert sa propre boutique. Bien que l’entreprise ait ses défis, comme investir de l’argent pour acheter des matériaux pour la production, Sylvester est heureux d’être indépendant et d’avoir une place dans sa communauté. « Je gagne ma vie […], ma femme et mon enfant sont à ma charge. »

 

 

Dès son plus jeune âge, Jean-Jacques voulait devenir boulanger. Lorsque ses parents ont été tués en 2013, il a plutôt dû abandonner l’école et rejoindre le combat pour survivre. Il a été un enfant soldat pendant sept ans.

Jean-Jacques a vite compris qu’il n’aimait pas une vie de violence, mais il ne savait pas vers qui se tourner : « Je ne croyais plus en rien et j’avais perdu tout espoir. »

Puis, un jour, les défenseurs de la démobilisation du JRS ont rencontré le groupe armé et leur ont demandé de laisser les enfants rentrer chez eux. Jean-Jacques a été libéré et a rejoint une formation de boulanger professionnel, réalisant ainsi ses rêves d’enfant.

Avec deux autres jeunes hommes, Jean-Jacques a ouvert la boulangerie dont il avait toujours rêvé. « Je me sens utile, et je gagne honnêtement ma vie. Les gens apprécient vraiment mon pain », partage-t-il avec fierté. Avec son entreprise, il prend désormais soin de lui et de ses frères.

 

 

En RCA et dans le monde entier, le JRS continue à construire des ponts entre les personnes déplacées de force et entre les réfugiés et les communautés d’accueil.

Conscients des impacts personnels et communautaires de la violence, le travail de réconciliation du JRS est ancré dans la justice et le dialogue entre les groupes.

En offrant des moyens de subsistance à d’anciens enfants soldats comme Pierre, Sylvester et Jean-Jacques, et en créant des espaces d’hospitalité et d’accueil, les communautés peuvent redécouvrir leur humanité commune.

 

Le programme a été financé par l’UNICEF et le JRS USA.

* Les noms et les lieux ont été modifiés pour protéger l’identité des enfants.