Créer un espace sûr pour les femmes déplacées à l’intérieur du Cameroun

25 avril 2023

Daniella, une jeune fille déplacée qui a participé au Camp GLOW, travaille dans son atelier de couture traditionnel au Cameroun. Le JRS a créé un espace sûr pour les femmes déplacées à l'intérieur du Cameroun afin de renforcer sa réponse humanitaire dans le pays.
Daniella, une jeune fille déplacée qui a participé au Camp GLOW, travaille dans son atelier de couture traditionnel au Cameroun (Service jésuite des réfugiés).
Il était très important pour moi de partager mes expériences passées avec toutes les filles. Écouter les témoignages d'autres personnes victimes de violence m'a aidée à reconnaître les premiers signes de ce phénomène.
Nadine, une jeune fille déplacée à l'intérieur de son pays qui a participé au camp GLOW.

Dans le but de renforcer sa réponse humanitaire face aux besoins de protection des femmes et des filles déplacées dans la région, le JRS Afrique de l’Ouest a organisé le camp GLOW, acronyme de Girls Leading Our World (Les Filles Guident Notre Monde), financé par le gouvernement basque et par notre partenaire Alboan.

Dix jours de cohabitation pour 40 filles, âgées de 12 à 25 ans, au cours desquels elles ont partagé leurs expériences, acquis des outils et profité d’un espace sûr et propice à la guérison. « Nous avons décidé d’organiser le camp à Kribi, une région côtière du sud du Cameroun, parce qu’il s’agissait d’un espace neutre où elles pouvaient parler librement de questions complexes », a attesté Kongmo Kingsley, agent de terrain. Au cours de ces journées, les filles ont travaillé ensemble sur des sujets tels que l’éducation sexuelle, l’estime de soi, les droits de l’homme, la communication interpersonnelle et la résolution des conflits. L’objectif principal était de mettre l’accent sur le rôle majeur des filles dans la société, de promouvoir le leadership et d’apporter les compétences nécessaires pour lutter contre la violence basée sur le genre (VBG).

La résilience face aux difficultés

Dans les zones urbaines de Yaoundé et de Douala, au Cameroun, le JRS soutient les personnes déplacées à l’intérieur du pays (IDP), qui fuient les conflits sociopolitiques dans les régions du nord-ouest et du sud-ouest du pays. Cette crise, qui a débuté en 2017, a forcé des milliers de personnes à fuir, tandis que de nombreuses autres sont déplacées à l’intérieur du pays. « Les femmes que nous aidons arrivent à Yaoundé traumatisées par les viols, les meurtres et l’insécurité. Elles viennent ici dans l’espoir de trouver la sécurité pour elles-mêmes et leurs familles », déclare Kingsley. « En outre, lorsqu’elles arrivent ici, elles sont exposées à la stigmatisation, aux abus et à la violence domestique. »

« Pour les femmes déplacées à l’intérieur du Cameroun, il est difficile de rêver dans une société qui ne leur permet pas de le faire. Les aider à rêver a été une expérience merveilleuse », déclare Christian Alama, expert du JRS dans le domaine de la SMSPS. Le partage des peurs, des expériences et des émotions a été bénéfique pour les filles. « Nous avons travaillé avec elles pour renforcer leur capacité à faire face aux difficultés. La plupart d’entre elles ont été violées et ont subi de nombreuses violences et partager leurs expériences avec d’autres filles s’est avéré thérapeutique. De plus, en tant que psychologue, je leur ai fourni des ressources de gestion du stress pour faire face à des situations complexes », a expliqué Christian. « Le camp Glow a été une merveilleuse initiative communautaire en matière de santé mentale et de soutien psychosociale. »

Je ne pensais pas qu'un jour comme celui-ci pouvait arriver dans ma vie. Le camp GLOW m'a appris qu'en tant que fille, je ne dois pas me sous-estimer.
Daniella, une jeune fille déplacée à l'intérieur de son pays qui a participé au camp GLOW.

Daniella* est originaire de la région du nord-ouest du Cameroun et, en 2019, elle a quitté son foyer en raison de la crise anglophone qui sévit dans la région. « Il y avait beaucoup de meurtres autour de nous. Quand la crise a commencé, les maisons ont été brûlées et l’un de mes cousins a été tué. J’ai donc décidé d’aller vivre à Yaoundé. » Le Cameroun étant un pays bilingue, il a été difficile pour Daniella de s’intégrer à Yaoundé parce qu’elle ne parle pas français, ce qui a affecté son estime de soi.

Elle décrit le camp GLOW comme une formidable occasion de se développer et de rencontrer d’autres filles. « Je ne pensais pas qu’un jour comme celui-ci pouvait arriver dans ma vie. Le camp GLOW m’a appris qu’en tant que fille, je ne dois pas me sous-estimer et que je peux faire tout ce qu’un homme peut faire. »

Le JRS soutient également l’activité de couture traditionnelle de Daniella par le biais du programme de subsistance. « Je peux mettre de la nourriture sur ma table et mes enfants vont à l’école grâce à ce programme. »

Quand on va à l'école, on a plus d'opportunités. Dans ma région, les filles n'ont pas toujours ces possibilités, car les familles les obligent souvent à se marier à l'âge de 13 ou 14 ans. Je leur dis : vous êtes capables, ne vous sous-estimez pas.
Nadine, une jeune fille déplacée à l'intérieur de son pays qui a participé au camp GLOW.

Nadine est originaire de la région du sud-ouest du Cameroun et est arrivée dans la capitale en 2019. En raison de la crise, elle a dû interrompre ses études. « Lorsque je suis arrivée, j’ai eu beaucoup de mal à prendre soin de moi. Je devais faire face à des garçons qui voulaient profiter de moi ». Le JRS l’a aidée à suivre une formation à la production de savon et lui a fourni le matériel nécessaire pour démarrer sa propre petite entreprise.

L’une des choses que Nadine apprécie le plus dans sa participation au camp GLOW est sans aucun doute le fait de partager ses expériences avec d’autres femmes et de se sentir soutenue par les expériences d’autres jeunes filles. « Elles ont partagé leur expérience de la violence et, ensemble, nous avons appris à reconnaître les signes précurseurs afin de pouvoir agir. » Pour elle, l’éducation est essentielle et elle encourage toujours les jeunes filles à continuer à étudier. « Quand on va à l’école, on a plus d’opportunités. Dans ma région, les filles n’ont pas toujours ces possibilités, car les familles les obligent souvent à se marier à l’âge de 13 ou 14 ans. Je leur dis : vous êtes capables, ne vous sous-estimez pas. »

« Dans le camp GLOW, j’ai appris que personne ne peut forcer une femme à se marier. J’ai également appris ce qu’était la violence basée sur le genre : comment y faire face, la surmonter et la dénoncer. Il est important de parler quand on est victime de violence. » Avant, elle pensait qu’elle n’était personne, mais grâce à l’atelier sur l’estime de soi et au soutien psychosocial, elle a maintenant confiance en elle.

*nom de fantaisie destiné à protéger l’identité de la personne