40 ans d’accompagnement : Sœur Inès
22 avril 2020
Sœur Inès Oleaga Castellet ACI a servi au Timor-Leste pendant six ans avant de partir en République Démocratique du Congo (RDC) pour accompagner les personnes déplacées et les réfugiés. Sr. Inès revient sur ses trois ans et demi en RDC et sur ce qu’elle décrit comme le don de vivre chaque jour comme le dernier. Aujourd’hui elle poursuit sa mission à Rome au sein de l’équipe générale de sa Congrégation, les Servantes du Sacré-Cœur.
Décrivez votre vie et ce qui se passait lorsque vous vous êtes impliquez pour la première fois avec JRS.
J’ai été bouleversée quand je suis arrivée à Masisi, au nord du Kivu. La beauté, la pauvreté, la violence, l’espoir… tout était écrasant. J’ai rejoint JRS Grand Lacs à partir d’une autre mission qui me passionne aussi au Timor oriental où j’avais déjà accompagné des personnes déplacées. C’était un cadeau d’atterrir directement au cœur de JRS. En visitant les camps de Masisi, j’ai découvert cette « étincelle » qui a dû aussi allumer la passion d’Arrupe, littéralement parlant, et qui soutient la mission dans des endroits inatteignables et où aimer vivre, moins sur vos pieds et plus dans votre cœur, est tout ce qui reste. Depuis le premier jour, j’ai été surpassée par ce nombre : 1 million de personnes déplacées, sont devenus des visages et des noms que j’allais accompagner, servir et défendre sans repos, et « sans me soucier des blessures », me sentant honorée qu’ils m’accueillent dans leur vie pour marcher ensemble une partie de leur chemin.
Où en êtes-vous dans votre vie aujourd’hui ?
“Do not forget the words of those who’ve seen your eyes” (Dt 4,9). Papa Bushu, tate Helene, Tuliza, Papa Samson, Jolie, Dusabe, Exode … they are still the words that inspire our current mission.
Le moment est venu pour moi de continuer à soutenir les missions aux frontières par l’arrière, en tant que membre de l’équipe de direction de mon institution religieuse. Le pouvoir d’attraction qui me meut continue d’être le même : justice, paix, pain, dignité et joie pour tous, en particulier ceux qui ont été oubliés et exclus du système dominant. Devant mon bureau où beaucoup de papiers circulent, j’ai quelques photos de mon séjour à Masisi et une phrase : « (…) de peur que tu n’oublies les choses que tes yeux ont vues » (Dt 4,9). Papa Bushu, Tata Hélène, Tuliza, Papa Samson, Jolie, Dusabe, Exode… ce sont encore les mots qui inspirent notre mission actuelle.
Quelle différence JRS a-t-il fait dans votre vie ?
Je l’ai répété plusieurs fois : le temps à Masisi a été une agitation totale dans ma vie. La vulnérabilité des gens avec qui j’ai marché et la brutalité du conflit armé qui nous entourait m’ont donné le don de vivre chaque jour comme si c’était le dernier et rende ma vie heureuse. Avec les femmes du Congo, j’ai découvert l’espoir, en majuscules ; avec les personnes âgées abandonnées dans les champs, j’ai appris la valeur d’une visite gratuite ; avec les enfants, que tout ce que nous faisons, ne sera jamais suffisant pour les empêcher de devenir des enfants soldats ; avec les hommes armés, j’ai appris que le partage d’une cigarette peut être « un accord de paix », avec mon équipe JRS qu’il y a toujours des raisons de célébrer… et bien plus encore !
JRS parle de marcher avec les gens que nous servons et de les accompagner dans leurs voyages. Qu’est-ce que l’accompagnement signifie pour vous ?
C’est la meilleure façon de « ne plus vivre pour soi-même ». Faire de la place à Dieu qui est celui qui n’abandonne aucun de ses fils et filles crée des liens au-delà de l’efficacité et de la logique humaine. Concentrer notre cœur dans la bonne direction pour toujours rester proche et pratiquer l’amour véritable : Une mère enceinte, travaillant à JRS et vivant dans le camp de Bukombo est entrée dans le travail tout en fuyant après une attaque sur le camp, jetant une lumière sur sa course et a nommé son fils : Exode. Dès que son premier appel a été possible, elle a contacté JRS pour partager sa joie et annoncer qu’ils allaient bien … elle savait que nous serions en train d’attendre parce que nous n’avons jamais abandonné ceux que Dieu nous avait confiés pour les accompagner.